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L'étonnement perpétuel

8 mars 2013

Les femmes sont-elles des hommes comme les autres ?

LE FEMINISME ET LE DROIT DES FEMMES

1°) La différence entre les hommes et les femmes :

Dans le débat du féminisme, on pose tout d’abord la question de la différence entre les hommes et les femmes. Un point essentiel du débat est en effet de savoir s’il y a une réelle différence entre les hommes et les femmes.

A priori, un certains nombres de traits physiologiques nous distinguent. Ainsi, les deux différences majeures qui nous distinguent sont : le mix hormonal et la capacité de la femme à porter l’enfant. Les différences hormonales font que les hommes sont en moyenne plus grands et plus forts que les femmes. Ce n’est pas un critère différenciant fort mais sur certains métiers, on note l’absence de femmes pour ces raisons. Par exemple, dans les forces spéciales de l’armée française, les femmes ne sont pas interdites mais ne peuvent pas physiquement réussir les tests pour y entrer.

La grosse différence entre les deux sexes repose sur la capacité de la femme à donner naissance à un enfant. Dans nos sociétés où le travail domestique est mal considéré, c’est une source de discrimination forte car le simple moment de la grossesse oblige la femme à se mettre en retrait. La grossesse de la femme est un élément important qui conduit à une différenciation de fait entre hommes et femmes.

2°) On ne naît pas femme, on le devient :

On vient de voir qu’il y a de facto des différences entre hommes et femmes. C’est idiot mais certains féministes devraient parfois admettre l’évidence. Ces différences physiologiques vont-elles plus loin ? Et surtout, cela va-t-il plus loin que ça ? Y a-t-il réellement des attitudes, des qualités, des comportements, des manières de penser typiquement féminines lorsque d’autres seraient typiquement masculines ?

Dans les tentatives de réponse à ces questions, on trouve de nombreuses études qui montrent que les femmes managers ont des qualité d’écoute supérieures aux hommes ou alors que les hommes sont plus aptes à se mettre en compétition que les femmes… Difficile de distinguer alors ce qui tient de l’éducation et du fait que, depuis la maternelle, on distingue même marginalement l’éducation du garçon et de la fille, et ce qui tient réellement de l’essence, des caractères physiologiques entre les deux sexes.

A priori, le mélange hormonal a une influence sur nos comportements, notre manière de prendre des décisions et de réfléchir. Je ne suis donc pas d’accord avec l’idée qui veut que la femme serait un homme comme un autre ou un homme une femme comme une autre. Il y a des fondamentaux qui nous distingue l’un de l’autre et qui ne tiennent pas seulement de la culture et de l’environnement dans lequel on grandit. Les hommes ont des points communs entre eux qu’ils ne pourront que difficilement expliquer à une femme et les femmes ont des points communs entre eux qu’ils ne pourront que difficilement expliquer à un homme. Un homme ne pourra jamais comprendre ce qui se passe au moment d’avoir ses règles ou au moment de mettre au monde un enfant. Une femme ne pourra jamais comprendre cette pulsion masculine qui participe de l'hubris et d'un égo souvent surdimensionné.

3°) Il y a des différences d’essence mais minimes :

Il y a donc des différences d’essence entre hommes et femmes mais on a eu tendance à les exagérer. L’éducation a foncièrement grossi les traits et même travesti certains aspects. Dès la plus petite enfance, le garçon est mis en situation de prendre des décisions, d’agir et de commander alors que la fille est initiée aux travaux domestiques, des tâches que nos sociétés reconnaissent comme inférieures, davantage dans l’obéissance et la soumission à une autorité. Cela n’a rien à voir avec les différences entre les hommes et les femmes. La grammaire, l'éducation, la publicité, l'art ou la religion ont contribué à donner aux hommes et aux femmes des rôles très différents que rien ne prédestinait.

Si les deux sexes ont des caractéristiques différentes, les deux peuvent analyser, prendre des décisions, obéir ou commander. Hommes et femmes peuvent accomplir tous les métiers de ce monde avec des qualités parfois légèrement différentes mais tout aussi complètes et surtout complémentaires. Bien sûr, une femme aura toujours un désavantage au moment de postuler à un poste de parachutiste dans l’armée ou de sapeur-pompier et bien sûr un homme aura toujours un désavantage au moment de postuler à un poste de sage-femme car il aura toujours l’impossibilité de connaître exactement les sensations spécifiques de la grossesse et de l’accouchement. Mais pour la majorité des postes, il n’y aucune raison de privilégier l’un ou l’autre des postes et pour ceux cités précédemment, il y a un bénéfice indéniable à trouver les deux sexes y être représenté.

Les clichés ont la vie dure et on a tendance à creuser le fossé des différences entre les hommes et les femmes. Ainsi, il semblerait logique que les hommes occupent des postes financiers et les femmes plutôt les postes de ressources humaines. C’est le cas aujourd’hui mais cela ne repose sur rien. Le mix des qualités nécessaires pour l’un ou l’autre de ces postes est également répandu chez les deux sexes et de manière générale, c’est le mélange des genres qui produira le plus de bénéfices.

4°) Quelles solutions ?

La ségrégation se fait dès la petite enfance et il y a donc de la marge d’action à chaque étape. La plupart des féministes s’opposent aux quotas. Leur idée est que le quota entérine l’infériorité de la femme qui ne pourrait pas s’en sortir par elle-même. Au contraire, je crois que les quotas ne font qu’entériner le fait qu’il y a une discrimination anormale entre les hommes et les femmes. C’est un moyen mécanique d’obliger la société à se rééquilibrer. On agit ainsi par en haut et ensuite, en cascade, cela va avoir une influence jusqu’en bas, c’est-à-dire sur les congés parentaux par exemple ou sur la distribution et la reconnaissance du travail domestique…

 

Il faut donc agir à la fois par en bas et par en haut. Par en haut avec les quotas dans les entreprises, les institutions et les administrations, assortis de sanctions lourdes en cas de non-respect. Par en bas avec des congés parentaux égaux pour les deux parents, une valorisation du travail domestique, une dédifférenciation dans l’éducation depuis la maternelle, la fin du sexisme dans la publicité ou le langage quotidien…

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6 mars 2013

La souffrance animale comme motivation pour être végétarien

LE VEGETARISME

Le scandale actuel sur la viande des plats préparés ramène le problème de la production alimentaire industrielle sur le devant de la scène et certains y ont vu également une occasion de s’intéresser au végétarisme et ses variantes : végétalisme, véganisme, flexitarisme et autres… Le débat sur l’industrie agroalimentaire est en fait une suite logique de celui du végétarisme qui est essentiel.

On peut attaquer la question du végétarisme par plusieurs bouts : éthique ; santé ; écologie ; évolution ; tradition. Selon moi, le côté éthique devrait être la seule véritable motivation mais chaque aspect apporte de bonnes raisons de se porter vers le végétarisme. C’est l’un des rares débats sur lequel il m’est difficile de voir de bonnes raisons de ne pas devenir végétarisme mis à part la paresse intellectuelle et l’inertie à ses habitudes.

1°) La défense de la tradition :

Il y a tout d’abord une partie de la population qui ne se pose même pas la question du végétarisme et qui suit les habitudes alimentaires qui sont les plus coutumières. On me pardonnera de ne pas considérer cela comme un argument fort.

Une autre partie va défendre ardemment la place de la viande et du poisson dans la gastronomie. Certains pourront le faire par rapport aux apports en protéines (on le verra par la suite) ou alors par rapport à la tradition ou au goût. Le style d’argumentaire fréquent dans ce cas sera une variante des affirmations logiques qui suivent : la viande c’est bon donc j’en mange ; j’ai toujours mangé de la viande donc je continue à le faire ; tout le monde mange de la viande donc moi aussi… C’est un argumentaire dogmatique et irrecevable. Il suffit de le transporter sur d’autres sujets pour se rendre compte de son ridicule. Si un cannibale nous explique que la viande humaine est très gouteuse et que sa famille en a toujours mangé, on ne manquera pas de considérer cet individu comme fou et son argumentaire comme peu convaincant. Le fait d’avoir toujours fait une erreur ne légitime pas cette erreur. Le fait d’apprécier quelque chose ne fait pas de cette chose quelque chose de bien.

2°) La supériorité de l’homme :

L’argumentaire précédent est idiot et beaucoup s’en rendent rapidement compte dans un débat sur le végétarisme. Beaucoup sont ceux qui enchaînent alors sur l’argument de la supériorité de l’homme qui est tout à fait recevable même si assez fragile.

L’argument est le suivant : l’être humain est une espèce « supérieure » aux autres espèces animales qu’elle peut donc exploiter, tuer, manger. Bien que je sois en désaccord sur cette difficile définition de la supériorité, l’argument peut tenir. Si l’on pense que l’animal n’est qu’une machine un peu évoluée, alors il n’y a aucune raison de ne pas l’utiliser comme un objet. C’est ce que pensait Descartes par exemple. Mais si l’on considère la définition de cette supériorité et qu’on pose le langage ou la conscience de soi, alors on pourrait trouver des animaux qui sont plus humains que des nourrissons ou des handicapés mentaux. C’est une argumentation qui est donc bien fragile.

A cela vient parfois s’ajouter l’argument de la chaîne alimentaire : beaucoup d’animaux en tuent d’autres pour se nourrir alors pourquoi pas l’homme. L’homme devient alors un animal comme un autre. C’est selon moi l’argument le plus fort et la raison pour laquelle je ne m’interdirai jamais de tuer et manger un lapin ou une truite si je meurs de faim. Toutefois, la différence avec les autres animaux carnivores est double : l’être humain n’est pas obligé de manger de la viande pour survivre et surtout l’être humain ne chasse pas sa nourriture mais l’exploite. A la différence du requin ou de l’ours, l’homme peut survivre sans viande. Et surtout, à la différence des animaux carnivores, l’homme torture littéralement les animaux et les considère comme des choses. L’individu qui chasse sa nourriture sans gâcher la viande est à mes yeux le seul qui peut légitimer sa consommation de viande. Celui qui achète sa viande provenant de l’industrie alimentaire ne peut qu’être coupable.

3°) La santé :

Certains pensent sincèrement qu’il faut manger de la viande et du poisson pour être en bonne santé. Il est vrai que celui qui est végétalien et refuse tout produit d’origine animale aura des carences qu’il devra combler. Mais celui qui accepte les produits lactés et les œufs n’aura aucune carence. On consomme aujourd’hui beaucoup trop de protéines par rapport à nos besoins et on peut trouver nos besoins journaliers en protéines dans de nombreux autres aliments : lentilles, pain, œufs, pois chiches, riz, pâtes…

Celui qui regarde à son hygiène de vie sera plutôt enclin à refuser la viande et le poisson, au moins d’origine industrielle. Même les légumes, fruits et céréales sont suspects avec les insecticides, pesticides ou mélanges d’OGMs. Et les scandales sur les produits animaliers sont encore plus effrayants. On peut rajouter les risques cardio-vasculaires de ceux qui abusent de la viande rouge ou de nombreux arguments qui font du régime végétarien une meilleure hygiène de vie.

4°) L’argument environnemental :

Aujourd’hui, cet argument arrive au-devant de la scène. L’élevage consomme énormément d’eau, est très polluant (le méthane produit par le pet des vaches par exemple) et ne présente pas un bilan énergétique satisfaisant : la consommation en protéines de la vache est égale voire supérieure à la quantité de protéines que sa viande contiendra.

Au moment de penser à nourrir une planète surpeuplée, cette question écologique devrait au moins permettre une augmentation du coût de la viande et cesser cette cuisine européenne ou la pièce de viande est le centre de l’assiette.

5°) L’argument éthique :

Cela devrait être le seul point de débat mais c’est hélas rarement le cas. Quand on considère la souffrance, la torture des animaux qui sont élevés industriellement, il est difficile de rester de marbre. Sans prendre les exemples extrêmes de ces bêtes que l’on contraint à ne pas bouger pour assurer une viande plus tendre ou ces vaches que l’on modifie génétiquement pour qu’elles produisent davantage de lait, on ne peut pas être insensible à la souffrance de l’animal qui arrive à l’abattoir et qui a tout le temps de paniquer avant d’être tué.

Peter Singer, qui milite contre le spécisme, pose sa décision d’être végétarien sur la souffrance engendrée. Je suis à 100% d’accord avec lui pour dire que c’est à partir du moment qu’un animal souffre que l’on doit considérer que son traitement est anormal. Les animaux qui s’entassent dans des espaces minuscules, qui pataugent dans les flaques de sang avant d’être tués sont des animaux qui souffrent et cela ne peut pas être considéré comme normal. L’homme a su s’élever à un stade de respect et de tolérance certes constamment menacé par certains dérives mais fondamentalement extraordinaire. Le respect de l’animal, c’est le respect de la vie, une vie que l’on ne veut pas voir en souffrance.

2 mars 2013

Stop à l'hypocrisie de l'interdiction du cannabis en France

LEGALISATION DU CANNABIS

 

C'est une question qui est d'actualité dans de nombreux pays européens et américains et qui a quelques peines à être dépassionné en France. Les politiques ne l'abordent guère d'un point de vue pragmatique et se contente trop souvent d'une posture idéologique qui se passe d'argumentation. Le rapport Vaillant a vite été oublié alors qu'il était très fouillé et très intéressant ; les socialistes et les écologistes au pouvoir évitent d'aborder le sujet.

1°) La dangerosité pour la santé :

En 1971, l'Organisation Mondiale de la Santé propose une classification des psychotropes en fonction de trois critères : dépendance physique, dépendance psychique et tolérance. Ce rapport établit que la dépendance physique est faible, que la dépendance psychique est moyenne et la tolérance possible à forte dose. Si l'on compare à l'alcool où tous les indicateurs sont rouges, le cannabis peut alors être considéré comme une drogue douce. Les tenants de l'interdiction du cannabis devraient donc être cohérents et également militer pour une interdiction de l'alcool. En revanche, ceux qui s'offusque d'une légalisation du cannabis ne peuvent pas défendre la vente et la publicité de l'alcool en arguant que celui-ci revêt un caractère traditionnel.

Le rapport Roques en 1998 va encore plus loin. Le cannabis ne représente aucune dépendance physique, psychique, aucune neurotoxicité et une dangerosité sociale faible. A contrario, les indicateurs pour le tabac et pour l'alcool sont de nouveau rouges. Leur toxicité est très élevée et la dépendance également très élevée. De quoi rendre le débat, a minima, nécessaire.

2°) L'hypocrisie :

Faut-il mieux ne pas consommer de cannabis ? Si l'on désire avoir une hygiène de vie complètement saine, c'est certain qu'il est préférable de s'en passer tout comme le tabagisme est nuisible ou la consommation d'alcool dangereuse pour la santé. Faut-il l'interdire ? Non.

C'est une complète hypocrisie de voir des politiques être outrés du simple débat sur la légalisation du cannabis alors qu'ils iront fumer une cigarette en sortant de l'interview et boire du vin lors du dîner. La consommation de cannabis doit se faire avec modération mais cela doit être le choix de chacun. La seule posture légitime est celle qui milite pour une interdiction de l'alcool et du tabac en même temps qu'une interdiction du cannabis. On ne peut pas défendre l'un et non les autres ou alors il faut défendre le cannabis et non les deux autres.

Pourquoi cette hypocrisie ? Il y a évidemment des enjeux financiers derrière cela. Il n'est pas question d'un complot mais simplement de se rappeler que l'industrie du tabac et plus encore l'industrie de l'alcool est un secteur important de l'économie. Ensuite, l'alcool particulièrement est entré dans la tradition française. Un bon repas français se doit d'être apprécié avec un bon vin. La bière ou le whisky sont des boissons que l'on peut apprécier sans être socialement écarté du monde. Apprécier la marijuana est une étrangeté alors qu'il y a réellement une grande variété et des types d'herbes aux senteurs excellentes. La consommation de cannabis n'a rien de marginal, particulièrement en France, ce pays où nous consommons davantage de cannabis que nul part ailleurs en Europe. Mais voilà, le cannabis est associé à la banlieue, à la mafia, au trafic, à la délinquance...

Le risque d'escalade est souvent invoqué. On commence par fumer un joint puis on sniff un rail de cocaïne et on finit pas s'injecter de l'héroïne en intraveineuse. Le cannabis serait finalement le défouloir pour qui veut braver l'interdit. Si on le légalise, alors le jeune adolescent qui veut braver la loi se sentirait obligé d'aller chercher la cocaïne ou des drogues dures et très dangereuses. C'est un raisonnement idiot. La consommation de cocaïne est davantage liée à la consommation d'alcool et les effets sont plus proches. L'immense majorité des fumeurs de cannabis n'ont jamais touché à une autre drogue illicite. Il est sûrement vrai que ceux qui consomment aujourd'hui les drogues de synthèse, la cocaïne ou l'héroïne ont également fumé du cannabis mais ils ont également bu de l'alcool jusqu'à l'ébriété et fumé des paquets de cigarettes. Ceux qui atteignent ces drogues extrêmes sont dans une optique du grand frisson et de la destruction du corps. C'est une corrélation qui fonctionne mais qui ne vaut pas causalité dans l'autre sens.

3°) Une approche pragmatique :

Dans le fond, aucune raison de ne pas légaliser le cannabis. Et si l'on tente une approche plus pragmatique, il y a d'autres raisons d'autoriser le cannabis. Je m'abstiendrai du côté médicinal, même si je pense qu'il vaut vraiment le coup de s'y attarder car le cannabis représente une option plus douce pour ceux qui sont atteints de cancers que la morphine par exemple. Mais je n'ai pas assez de connaissances pour me lancer dans ce débat avec certitude.

En revanche, il y a un côté social et économique que l'on peut évoquer. Si l'état organise la production et la distribution de cannabis comme il le fait pour le tabac, il peut y mettre des taxes et à la fois récolter une masse d'argent non négligeable en temps de crise. La majorité des consommateurs sera heureuse de pouvoir acheter légalement son produit, savoir que c'est une bonne qualité même si cela est un peu plus cher (ce qui ne serait même pas nécessairement le cas).

Ensuite, cela permet aussi de mieux contrôler les situations de détresse de certains gros consommateurs de marijuane. Il peut mieux prévenir, mieux aider car le sujet cessera d'être tabou. Un fumer de cannabis qui consomme pour masquer un mal-être osera davantage se confier à un médecin comme c'est le cas aujourd'hui avec le tabac ou l'alcool si le cannabis est légal.

Enfin, le marché du cannabis est un marché souterrain qui nourrit les banlieues et les trafics adjacents. Si l'on coupe ce moyen d'avoir de l'argent facile, les programmes sociaux dans les banlieues auront des effets démultipliés, la puissance des "gangs" dans les quartiers sera amoindrie, les trafics adjacents seront rendus plus difficiles. Ce sont aussi de bonnes raisons de mettre le sujet sur la table même si la seule faible dangerosité devrait être l'unique argument valable.

4°) La vigilance :

Autoriser le cannabis ne veut pas dire distribuer des joints au collège ou en faire de la publicité. C'est simplement faire le constat que certains veulent consommer ce produit et que la faible dangerosité de celui-ci incline à les laisser faire. Avec l'argent récolté par les taxes, il faut évidemment renforcer deux politiques : les contrôles routiers et le suivi médical. C'est une catastrophe que de conduire en étant stone. Tout comme c'est une catastrophe de conduire en étant saoul. C'est indéniable et il faudra des contrôles fréquents et sévères pour surveiller cet aspect essentiel (dès aujourd'hui, ces contrôles devraient être plus récurrents même si l'on sait la difficulté de trouver des moyens peu onéreux pour ce faire). Ensuite, la vente de cannabis devra être faite en donnant son identité, peut-être sous la forme de pass cannabis, pour surveiller les consommations excessives. Le vendeur de cannabis devrait donc être également un spécialiste médical et l'on peut imaginer que les pharmacies pourraient être un intermédiaire idéal.

2 mars 2013

La convivialité, par Ivan Illich

LA CONVIVIALITE

par Ivan ILLICH


I / Qui est Ivan Illich ?

Penseur autrichien (1926-2002), il étudie la philosophie et la théologie à Rome. Au moment de venir s'installer aux Etats-Unis, il est imprégné de culture chrétienne et gardera cette forte empreinte. Dans son premier ouvrage Une société sans école, il dénonce le système de l'éducation qui ne parvient pas aux buts qui lui sont assignés. Il fonde en 1961 le Centre pour la formation interculturelle à Cuernavaca. Il rentre en Allemagne en 1976 et meurt d'une tumeur en 2002, une tumeur qu'il a choisi de ne pas traiter pour être conforme à sa pensée dans laquelle le système de la médecine, à l'image du système éducatif, produit des effets pervers.

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II / Que nous dit-il ?

En 1973, il publie La Convivialité, un livre d'une centaine de pages qui synthétise sa pensée et son analyse de la société occidentale industrielle. Ce livre est une oeuvre d'une grande clarté et d'une grande intelligence dont la lecture est toujours éclairante dans les débats d'aujourd'hui. Pour bien comprendre les concepts-clés d'Illich, il constitue une introduction parfaite. On suivra ici le plan qu'il a choisi car il permet une explication linéaire, cohérente et facile de compréhension.

Illich le reconnaît aisément, son livre ne pose que des constats, des indicateurs qui clignotent quand l'outil manipule l'homme. Il ne donne pas de solutions politiques ou éthiques qui permettraient de reconstruire l'homme et/ou d'adopter un mode de production convivial. Pour autant, les constats qu'il pose sont terriblement pertinents et si l'on regarde le fonctionnement de notre société à travers son prisme de lecture, tous les indicateurs clignotent frénétiquement, nous appelant à l'action, une action qu'il nous reste à déterminer.

NB : on reprend les propres expressions d'Ivan Illich car il n'est nul besoin de reformuler ce que l'auteur a parfaitement explicité.

i) Deux seuils de mutation :

La plupart des institutions de nos pays ont dépassé ces deux seuils de mutation. Cela concerne aussi bien l'éducation que la médecine, les postes, l'assistance sociale, le bâtiment, les pompes funèbres ou les transports.

Lors du premier seuil, on applique un nouveau savoir à la solution d'un problème clairement défini. Des critères scientifiques permettent ensuite de mesurer le gain d'efficience obtenu. Lors du second seuil, le progrès réalisé devient un moyen d'exploiter l'ensemble du corps social, de le mettre au service de valeurs qu'une élite spécialisée, garante de sa propre valeur, détermine et révise sans cesse.

ii) La reconstruction conviviale :

Illich donne ici la définition de la convivialité : "la convivialité est la liberté individuelle réalisée dans la relation de production au sein d'une société dotée d'outils efficaces". Le passage de la productivité à la convivialité est le passage de la répétition du manque à la spontanéité du don. La société conviviale reposera sur des contrats sociaux qui garantissent à chacun l'accès le plus large et le plus libre aux outils conviviaux de la communauté, à la seule condition de ne pas léser l'égale liberté d'accès d'autrui.

Pour comprendre cette définition, il est nécessaire de comprendre le concept-clé d'outil chez le penseur autrichien. Quand Illitch mentionne un outil, il parle tout aussi bien d'un marteau, d'une voiture que du système éducatif ou des pompes funèbres. Un outil est, par définition, un moyen utilisé pour parvenir à une fin. La crise contemporaine repose sur le fait que l'outil a cessé d'être un moyen et est devenu une fin en lui-même. On est entré dans ce que Ellul appelerait une société technicienne. Considérons le système éducatif : sa première finalité était de réduire les inégalités sociales et il ne fait finalement que les accentuer. Considérons le système de transport : sa première finalité est de gagner du temps et il nous en fait perdre (si l'on considère le temps que l'on passe à acheter une voiture, l'entretenir, la conduire et le fait que la présence même de l'automobile conduit notre quotidien à rallonger les distances).

Un outil juste ou convivial répond à trois exigences : il est générateur d'efficience sans dégrader l'autonomie personnelle, il ne suscite ni maîtres ni esclaves et il élargit le rayon d'action personnel. L'outil convivial est celui qui me laisse la plus grande latttitude de modifier le monde au gré de mon intention. Chacun peut l'utiliser à des fins qu'il détermine lui-même. Citons quelques exemples d'outils conviviaux : la bicyclette, le roulement à billes, le téléphone (sous réserve), la force hydraulique ou le monte-charge.

La productivité actuelle est une industrialisation des besoins qui réduit toute satisfaction à un acte de vérification opérationnelle, qui remplace la joie de vivre par le plaisir d'appliquer une mesure. On retrouve dans ce champ lexical la dénonciation d'une société obsédée par la technique. On y retrouve le coeur de l'écologie politique où la croissance économique ne se justifie que par elle-même et où l'homme se satisfait simplement d'être plus efficace sans avoir en tête une quelconque finalité. Le dogme actuel est de gagner du temps, de rétrécir l'espace, d'accroître l'énergie, de prolonger la durée de vie. Le temps devient de l'argent. L'homme est redéfini comme source d'énergie mécanique. Le robot travaille pour l'homme mais c'est l'homme qu'on éduque pour travailler à ses côtés.

Le passage de la productivité à la convivalité, le prix de l'inversion, implique un renoncement à la surpopulation, à la surabondance et au surpouvoir. D'entre les trois, on ne sait dire lequel est le plus difficile à abandonner. Aujourd'hui, il est possible de concevoir des outils qui permettent d'éliminer l'esclavage de l'homme à l'égard de l'homme, sans pour autant l'asservir à la machine. La science peut aussi s'employer à simplifier l'outillage, à rendre chacun capable de façonner son environnement immédiat.


iii) L'équilibre :

Il y a cinq menaces portées à la population de la planète par le développement industriel avancé. On trouve dans ces cinq menaces l'essentiel des problèmes contemporains :
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  • la dégradation de l'environnement : le surpeuplement, la surabondance et la perversion de l'outil sont les trois forces qui se conjuguent pour mettre en péril l'équilibre écologique.
  • le monopole radical : c'est la domination d'un type de produit tel que le façonnement des villes par la voiture qui élimine le droit à la marche. C'est aussi le monopole radical des pompes funèbres qui interdit à quiconque d'enterrer ses morts. C'est le monopole radical des normes de construction qui interdit à quiconque de construire sa maison. C'est le monopole radical de la médecine qui interdit l'automédication.
  • la surprogrammation : les gens savent ce qu'on leur a appris mais ils n'apprennent plus par eux-mêmes.
  • la polarisation : le pouvoir se polarise ; la faim grandit chez les pauvres et la peur chez les riches. Sous la poussée de la mégamachine en expansion, le pouvoir de décider du destin de tous se concentre entre les mains de quelques-uns.
  • l'usure (obsolescence) : la nécessité artificielle et l'usure planifiée sont deux dimensions distinctes de la surefficience qui étayent une société où la hiérarchie sédimente le privilège.
  • l'insatisfaction : c'est la résultante du complexe et le moteur de la productivité.

L'équilibre de l'action, c'est l'équilibre entre le prix personnellement payé et le résultat obtenu, c'est la conscience que moyens et fins s'équilibrent.

iv) L'inversion politique :

Illich ne peut pas nous laisser simplement sur des constats et il analyse les obstacles de l'inversion politique et nous donne de facto les pistes de réflexion essentielles pour avancer vers la convivialité.

Il y a d'abord la nécessité de mettre fin à l'expertocratie. Le citoyen a abdiqué tout pouvoir en faveur de l'expert, seul compétent. La politique est devenue l'affaire des experts et la crise financière contemporaine souligne bien à la fois la faillite des experts mais aussi le pouvoir qu'ils ont pris. Toutes les questions sociétales se traitent sous la lumière de la science et de l'opinion de quelques spécialistes dont l'avis ne doit pas être remis en cause.

Ensuite, le mode industriel de production a établit sa domination non seulement sur les ressources et l'outillage mais aussi sur l'imagination et les désirs. L'importance de la publicité et du marketing est évidemment l'une des pierres centrales de cette domination. C'est un monopole radical généralisé. Cela va jusque dans la transformation du langage qui rend difficile aujourd'hui l'explicitation d'un autre monde. La langue tibétaine par exemple est bien incapable de traduire un traité d'expert en neuroscience mais dispose d'un champ lexical incroyablement vaste pour se rattacher à l'action humaine simple.

Enfin, il faut parvenir au recouvrement du droit car ce dernier est le ciment qui donne un semblant de cohérence, renforce et assure la reproduction de la société industrielle.

L'auteur autrichien ne va pas beaucoup plus loin dans les solutions qui nous sont offertes. Il nous avait prévenu dès le début de son livre. A l'orée des années 80, il imagine les deux grandes directions qui s'ouvrent à nos sociétés. Soit l'installation du facisme techno-bureaucratique qui fixe des limites multidimensionnelles à la croissance, juste en-deça de l'autodestruction. Soit on verra un processus politique qui permette à la population de déterminer le maximum que chacun peut exiger dans un monde aux ressources limitées ; un processus d'agrément portant sur la fixation et le maintien de limites à la croissance de l'outillage ; un processus d'encouragement de la recherche radicale de sorte qu'un nombre croissant de gens puissent faire toujours plus avec toujours moins. Ce sont toujours ces deux directions qui nous sont offertes.

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  • Pourquoi y a t'il quelque chose plutôt que rien ? Voilà le fondement de l'étonnement philosophique. Un étonnement qui est source de multiples questions et d'une belle dose de stimulation intellectuelle !
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